mercredi 4 juin 2014

Je suis ton ombre de Morgane Caussarieu

Edition : Mnémos
Collection : Dédales
Date de parution : 06/2014
Prix Papier : 20 €
282 pages

Le Temple, petit village du Sud-Ouest, ses plages, ses blockhaus, son unique bistro, son école où la violence est le seul remède à l’ennui.
Poil de Carotte y vit seul avec son père handicapé. Gamin perturbé aux penchants sadiques et souffre-douleur de ses camarades de classe, sa vie bascule lorsqu’il se rend dans une ferme calcinée en lisière de forêt.
Des fantômes y rôdent, paraît-il.
Mais en lieu et place de revenants, il découvre un étrange manuscrit rédigé par des jumeaux, il y a trois cents ans. Leur vie sauvage et heureuse à La Nouvelle-Orléans tourne au cauchemar lorsqu’un sulfureux marquis les prend à son service.
Plus Poil de Carotte avance dans sa lecture, plus des événements étranges surviennent : un chat noir qui parle, une voix qui lui chuchote la nuit à l’oreille, un enfant au teint trop pâle et aux lèvres trop rouges… Et s’il avait réveillé des forces aussi malsaines qu’attirantes ?

Depuis la sortie de son roman en 2012 de « Dans les veines », on ne tarit pas d’éloges sur la plume incisive de Morgane Caussarieu. J'ai trop hésité à succomber  sur son précédent roman et le rendez-vous ne s'est alors pas produit. Et une nouvelle fois, je lis à droite, à gauche des louanges sur son essai « Vampires & Bayous », Bayous … ça commence à fortement m'intriguer, j'ai une attirance magnétique pour la Louisiane que je suis bien incapable d'expliquer. Et là son dernier roman « Je suis ton ombre », mêlant le présent à  Le Temple, petit bled perdu d’Aquitaine et le passé dans les Bayous ne font qu'accroître encore plus ma curiosité. Pourtant je ne suis pas non plus une référence en terme de vampires, mais je pense m'être régalée juste avec ce qu'il fallait, sans jamais être tombée dans la nouvelle mouvance, romantico-vampirique, laquelle me donne immanquablement envie de me mettre les doigts profondément dans le gosier. Morgane Caussarieu, nous parle de vampires, j'ai presque envie de dire des vrais, pas des ersatz mièvres et sans saveur qui polluent cette nouvelle littérature de midinette. Après si chacun y trouve sans compte, qui suis-je pour en juger ?

« Je suis ton ombre » est l'histoire d'un jeune adolescent, Poil-de-Carotte, inutile de préciser les origines d'un tel sobriquet. On comprend vite que ce jeune garçon n'a pas une enfance des plus épanouies, en échec scolaire, souffre douleur, maigrelet et vivant dans une certaine misère sociale et rurale. Au fil du roman on en apprend plus sur le drame familial qui s'est joué. Son père infirme, défiguré ne peut plus gérer seul son quotidien, c'est donc au gamin qu'incombent les nombreuses corvées d'une ferme en partie rénovée. Alors qu'il rentre un soir après l'école, il se fait défier par un chat noir qui lui parle.
« Mais c'est le chat noir.
L'est revenu. Je ne l'ai pas vu depuis la fameuse soirée.
Je balance ma hache dans sa direction. La lame s'abat à quelques mètres de lui, rebondit contre un débris de métal rouillé qui sort du sol. Chié, j'ai mal visé. Il me nargue avec ces saloperies de pupilles fendues.
- Suis moi dans la forêt, qu'il me dit.
Je fais comme si je l'ai pas entendu. Les chats, ça cause pas, d'abord. Sauf celui-cà, il doit pas être au courant, parce qu'il continue :
- Tu as la frousse ou quoi ? Un grand garçon comme toi, ça n'a plus l'âge de croire au fantôme, si ?
- Les matous, ça cause pas . J'ai au moins l'âge de savoir ça. »
Il chevauche sa ponette pourtant pleine, et arrive aux abords d'une vieille bâtisse calcinée, il rentre à l'intérieur, l'arpente dans l'espoir de retrouver ce satané félin et se retrouve dans la cave, où il est pris de peur par un squelette pendu par les pieds, percute un coffre, s'enfonce une grosse écharde dans le genou, ramasse un carnet dans le coffre, voit un fantôme ?! Des ombres ?! Massacre un rat au passage … Rentre chez lui en laissant sa ponette sur place... Arrive enfin chez lui tétanisé, curieux ouvre le carnet, lit la première ligne « Si tu lis ces lignes, prie que je sois déjà mort, sinon, c'est toi qui mourra... ». Puis jette le carnet sous l'armoire se réfugie sous son oreiller et rêve de Paul... Finalement, il ne résistera pas longtemps avant de rouvrir ce carnet et être totalement fasciné par son contenu.

Sous une plume des plus efficaces, on est emporté par « Je suis ton ombre », entre récit oppressant, étouffant et sadisme écœurant, le roman nous entraîne avec facilité autant dans l'aquitaine qui se voit dépeindre au travers de Le Temple, petit bourgade, en un présent rural quelque peu dévasté par de nombreux problèmes sociaux : chômage, alcoolisme, violence, discriminations en tout genre. Que dans une Louisiane, emprise dans ce vaste commerce triangulaire détestable qu'il est encore difficile d'imaginer pour des contemporains...
Morgane n'a pas froid aux yeux et ose, elle aurait tort de faire de l'auto-censure, le vampire n'est pas un être angélique et bienveillant pour la bonne et simple raison qu'il a été nourri par l'avilissement des hommes, et que l'homme est sans aucun doute l'être le plus inventif en terme de torture, le plus abject alors comment peut-on reprocher aux vampires de décupler les vices dont ils ont été abreuvés...
Pour lire et apprécier « Je suis ton ombre », nul besoin de connaître le mythe du vampire, il faut juste garder le cœur bien accroché, les yeux bien ouverts et connaître le goût du sang...



« Oui je suis un monstre. Je ne l'ai jamais caché. Mais on m'a fait ainsi. Je n'ai rien demandé. Tu l'as lu. Au départ j'étais un petit garçon gentil et normal. Tout comme toi avant l'accident. Mais les adultes ont assombri mon âme. M'ont montré ce qu'était la cruauté.»


Les avis de Lune, Acr0Andéa, Gromovar, Xapur ...

10 commentaires:

  1. Bon bon, voilà qui commence bien ^^
    Par contre je trouve toujours le rapport pages/prix en dehors de mes limites psychologiques, mais je tenterai peut être de lire du Caussarieu en commençant par celui là du coup. Je l'ai mis dans la wishlist pour ne pas oublier ^^

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    1. Oui je comprends, j'ai pas grand chose à argumenter pour le montant du livre après Mnémos continue d'imprimer en France, c'est pas une mauvaise chose je trouve.

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  2. Il est dans ma PAL depuis les Imaginales. Je pense qu'il ne va pas y rester longtemps vu que j'avais passé un déjà un bon moment de lecture avec Dans Mes Veines et ta chronique me donne envie de le découvrir.

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  3. Dommagr que tu spoiles comme ça! Ca gâche le plaisir de ceux qui ne l'ont pas encore lu, surtout concernant le poney. Fais aussi relire tes chroniques, les fautes sont très dérangeantes. En dehors de ça, chapeau :)

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    1. Désolé, je n'avais pas ressenti "le sort" de la ponette comme un spoile.
      Pour les fautes je le confesse, il en reste certainement, mais je n'ai pas de relecteur sous le coude, et à force de me relire, j'avoue qu'au final je ne vois plus rien.

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  4. "Je suis ton ombre" met fait au premier abord penser à "Je suis ton ombre" de Loïc Le Borgne où il était aussi question, sur le mode horrifique, d'un adolescent aux prises avec des événements étranges.
    Tout ce que j'ai lu jusqu'à présent sur ce roman de Morgane Caussarieu me donne envie de le découvrir, d'autant plus qu'elle évite cette veine "romantico-vampirique" qui nous dégoutte tous aujourd'hui...

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    1. Je vais me pencher sur cet ouvrage, d'autant plus que j'ai succombé à la plume de Loïc Le Borgne avec Hysteresis.
      Et merci pour ce commentaire, je suis heureuse de te retrouver ici ;)

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  5. Je l'ai attrapé dans ma bibliothèque l'autre jour et pour ainsi dire dévoré en deux jours. C'est très sordide et malsain, mais qu'est-ce que c'est bien écrit ! je plussoie également les vampires de l'univers.

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